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Maître renard par l’odeur alléché
Lui tint à peu près ce langage:
«Hé! bonjour Monsieur du Corbeau
Que vous êtes joli! que vous me semblez beau!
Sans mentir, si votre ramage
Se rapporte à votre plumage
Vous êtes le phénix des hôtes de ces bois»
A ces mots le corbeau ne se sent pas de joie
Et pour montrer sa belle voix
Il ouvre un large bec laisse tomber sa proie.
Le renard s’en saisit et dit: «Mon bon Monsieur
Apprenez que tout flatteur
Vit aux dépens de celui qui l’écoute:
Cette leçon vaut bien un fromage sans doute.»
Le corbeau honteux et confus
Jura mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus.
La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf
Une grenouille vit un bœuf
Qui lui sembla de belle taille.
Elle, qui n’était pas grosse en tout comme un œuf,
Envieuse, s’étend, et s’enfle et se travaille,
Pour égaler l’animal en grosseur,
Disant: «Regardez bien, ma sœur;
Est-ce assez? dites-moi: n’y suis-je point encore?
Nenni. – M’y voici donc? – Point du tout. – M’y voilà?
– Vous n’en approchez point.» La chétive pécore
S’enfla si bien qu’elle creva.
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages.
Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs,
Tout prince a des ambassadeurs,
Tout marquis veut avoir des pages.
Les deux mulets
Deux mulets cheminaient, l’un d’avoine chargé,
L’autre portant l’argent de la gabelle.
Celui-ci, glorieux d’une charge si belle,
N’eût voulu pour beaucoup en être soulagé.
Il marchait d’un pas relevé,
Et faisait sonner sa sonnette:
Quand, l’ennemi se présentant,
Comme il en voulait à l’argent,
Sur le mulet du fisc une troupe se jette,
Le saisit au frein et l’arrête.
Le mulet, en se défendant,
Se sent percé de coups; il gémit, il soupire.
«Est-ce donc là, dit-il, ce qu’on m’avait promis?
Ce mulet qui me suit du danger se retire;
Et moi j’y tombe et je péris!
– Ami, lui dit son camarade,
Il n’est pas toujours bon d’avoir un haut emploi:
Si tu n’avais servi qu’un meunier, comme moi,
Tu ne serais pas si malade.
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